Le jaune

Contrairement à d’autres couleurs dont il a fallu apprendre à maîtriser la fabrication, le jaune s’est offert à l’état natif : les hommes de la Préhistoire collectent des ocres afin de réaliser les peintures dont ils couvrent les parois de certaines grottes. Si bien que l’on peut dire que le jaune est l’une des premières couleurs à s’inscrire dans une histoire de l’art millénaire. Durant l’Antiquité, on parvient à obtenir différents jaunes issus de plantes, principalement le genêt et le safran, ce qui a pour effet d’enrichir la palette existante. Le jaune est alors largement valorisé, les romaines arborent des vêtements teints en jaune pour les cérémonies mais aussi lors des mariages. Les fresques de Pompéi et d’Herculanum montrent quelques unes de ces élégantes parées de jaune.

Le Moyen-âge et le développement de la chrétienté en Europe vont modifier la perception du jaune, notamment parce que l’iconographie religieuse  codifie les représentations afin que chacun puisse identifier les différents protagonistes de la Bible sur les mosaïques, les retables ou les vitraux ; c’est le moment où l’on associe Judas à cette couleur dont il est systématiquement vêtu. Cette identification fait du jaune le synonyme de la duplicité, du mensonge et de la trahison. Pour autant, il n’est pas question de se priver des aspects flamboyants du jaune… Le Moyen-âge reporte donc l’ensemble des valeurs positives du jaune sur la couleur dorée que l’on associe à la lumière solaire et au ciel divin (fonds d’or des mosaïques Byzantines et de certains tableaux religieux du Moyen-âge et du début de la Renaissance). Ce doré est aussi signe d’opulence, de pouvoir et de joie. Dans certaines civilisations le jaune est associé au prestige du pouvoir, notamment en Chine où il est la couleur de l’Empereur, qui est le seul à pouvoir l’arborer. 

Est-ce parce que les XIXèmes et XXèmes siècles sont moins religieux ? C’est une hypothèse peut-être excessive… Reste que c’est à partir du XIXème siècle que le jaune va reconquérir sa place parmi les couleurs que l’on aime. Une fois encore ce retour en grâce passe par la peinture, d’abord par les peintres impressionnistes et post impressionnistes, puis par les Nabis et les Fauves. On peut citer les jaunes de Monet, Gauguin, Van Gogh, Matisse. Des gammes qui dans leur grande variété reflètent toutes les beautés du jaune dans la nature. En Parallèle, les aspects symboliques négatifs du jaune s’estomptent progressivement si bien que la couleur devient celle du maillot dont on gratifie le gagant du tour de France cycliste.

Ce qui frappe lorsque l’on examine l’histoire du jaune, c’est son omniprésence dans la décoration : tentures, garnitures de sièges, tapis, rideaux, le jaune s’invite dans les plus beaux brocarts, les soieries les plus précieuses, sans même parler des broderies de fils d’or ! Dans le vocabulaire des grands décorateurs du XXème siècle, il permet de ponctuer un espace, de souligner un détail. Dans les années 1920, les architectes du mouvement De Stijl aux Pays-Bas, principalement Gerrit Rietveld privilégient un style radical que viennent “égayer” des surfaces de couleurs pures (rouge, bleu, jaune). Le Corbusier s’en souviendra lorsqu’il construira les bâtiments publics de Chandigarh ou la Cité Radieuse… Ce vocabulaire de la couleur s’impose à partir des années 1950-1960, tous les designers et éditeurs proposent des meubles aux garnitures de couleurs vives ( textiles, ou simili cuir) et les matériaux de type Formica, fibre ou plastique adoptent cette même palette dans laquelle le jaune figure en très bonne place.

On ne le remarque pas toujours tant sa présence s’inscrit avec simplicité dans de nombreux projets sous toutes les latitudes, car le jaune chez Liaigre semble aller de pair avec le goût affirmé du naturel. Il est partout, intégré là où sa lumière paraît dupliquer celle du paysage ( Bora Bora, Nantucket), comme dans des contextes plus urbains (un appartement parisien, une maison à New Delhi, un restaurant à Londres). La gamme des jaunes est étendue : des tonalités chaudes et profondes, aux jaunes solaires, parois acides. Le cuir jaune décliné dans de nombreuses nuances habille chaises, fauteuils, bancs ; tandis que les cotons, les velours, les soies, les laines se déploient sur des canapés, des coussins, des tapis. Le doré et le mordoré font vibrer la lumière, et l’onyx jaune théâtralise avec élégance le bar d’un restaurant. La matériauthèque du Studio Liaigre offre une infinie variété de possibilités et

d’alternatives. Le jaune est un précieux élément de langage, qui suivant comment il est utilisé éclaire ou réchauffe les blanc et les beige; dialogue harmonieusement avec les bruns et les noirs. Il est à la fois intemporel et moderne, sophistiqué et généreux, audacieux et chic. Comme toutes les couleurs, son usage s’apprivoise suivant que l’on souhaite une touche discrète où qu’on lui donne une place déterminante. Il rend les intérieurs confortables car son ressenti est immédiatement  chaleureux et accueillant. Doré ou mordoré, il devient glamour et festif. Incontournable dans l’univers de Liaigre, il existe toujours une nuance de jaune prête à s’adapter à nos intérieurs qu’il s’agisse d’une villégiature ou d’un appartement ou d’une maison ou d’un lieu d’hospitalité.